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Le stress: signal d’alarme pour éviter l’épuisement

6 décembre 2022

Nathalie Parent

Nathalie Parent

psychologue

Temps de lecture 4 minutes
Stress aigu, stress chronique, épuisement… En quoi consistent-ils et comment faire pour mieux gérer notre stress afin de ne pas se rendre jusqu’à l’épuisement? Explications de la psychologue Nathalie Parent.
Arrivée à son poste de travail, Marie s’assoit en regardant la pile de dossiers qui l’attend depuis un moment déjà. Elle regarde les messages dans sa boîte courriel s’accumuler en se disant qu’elle fera le ménage plus tard. Elle sent un fond de découragement en elle, mais prend une bonne respiration et un dossier, qu’elle tente de lire. Une notification arrive au même moment, ce qui la sort de sa tentative de concentration. Un nœud dans l’estomac et un poing dans le dos, elle reprend sa lecture. Elle est interrompue par un collègue cette fois-ci, qui lui fait une demande « urgente », à laquelle elle répond immédiatement. Quelques minutes plus tard, elle reprend son dossier et relie pour une cinquième fois la même phrase sans la comprendre, ce qui ne lui arrive jamais d’habitude, efficace comme elle est. Soudain, tout s’emmêle dans sa tête, les larmes coulent toutes seules… Marie s’effondre. Le diagnostic tombe avec Marie: épuisement.

Comment Marie a-t-elle pu se rendre jusque-là? Stress, fatigue, épuisement… Tentons d’identifier comment cela fonctionne.

Qu’est-ce que l’épuisement?

Je ne vous apprends rien en vous disant que le stress fait partie de la vie et qu’il est même nécessaire à la survie de notre espèce. Cependant, en trop grande quantité pour notre capacité à le gérer ou sur une période trop longue, un stress peut conduire à un «débordement»: c’est l’épuisement.

Nous avons tous un «contenant à stress»

J’aime bien utiliser l’image du contenant pour expliquer ce phénomène. C’est comme si nous avions un contenant à l’intérieur de nous pour contenir les événements de stress, les tensions accumulées et les émotions. Chaque personne en possède un, plus ou moins grand et plus ou moins rempli, selon les événements de sa vie, son âge, sa capacité physique et mentale, sa perception des événements et sa personnalité. Si rien n’est fait pour aider à le vider ou à en diminuer le contenu, il va déborder: crises, troubles de comportement, apparition d’une maladie physique ou mentale.

Quand le contenant déborde, c’est l’épuisement

Le débordement du contenant peut amener un épuisement sur le plan professionnel comme semble le vivre Marie dans l’histoire. Mais les événements de stress peuvent provenir de la vie personnelle et amener également un épuisement: difficultés familiales ou amicales, deuils, émotions refoulées, changements, etc.

La fatigue s’installe quand on va au-delà des capacités du corps. C’est fréquent de voir les gens hyperperformants en arriver à l’épuisement à la mi-quarantaine, la cinquantaine. Le corps a ses limites. Et les mécanismes mis en place pour s’adapter à court terme et tenter de garder l’équilibre (évitement, hyperactivité, déplacement, compensation, compulsion, etc.) vont perdre de leur efficacité.

Les 3 phases du stress

Le stress aigu

Les événements de stress ponctuels qui se produisent dans nos vies (personnelles ou professionnelles), que ce soit une date limite pour remettre un document, l’urgence de réagir, une maladie ou un accident, provoquent un stress aigu (sécrétion d’hormones) qui induit plusieurs modifications dans le corps pour que celui-ci réagisse de façon optimale: accélération du cœur, arrêt temporaire du système digestif, augmentation du métabolisme et du niveau d’énergie, augmentation des sens (vue, ouïe), épaississement du sang pour coagulation en cas de blessure, etc.1 C’est la phase d’alarme.

Le stress chronique

Une deuxième phase, appelée «phase de résistance», s’enclenche lorsque ces mêmes événements s’accumulent ou perdurent; le corps puisera dans ses réserves d’énergie en même temps qu’il sera encore capable d’en produire.

L’épuisement

Et lorsque le stress se poursuit au-delà des capacités de récupération du corps, c’est la phase d’épuisement. À l’image d’un verre d’eau qu’on tient à bout de bras; au début, rien de plus banal, mais après des minutes, voire des heures, les muscles s’épuisent, et le bras tombe de fatigue.

Symptômes de stress à surveiller avant d’atteindre l’épuisement

C’est pendant la phase de résistance que notre corps nous envoie des signaux qu’on peut écouter pour réagir avant l’épuisement; ce sont nos drapeaux jaunes. Voici une liste des manifestations de stress chronique qui nous permettent de prendre conscience de soi et de réagir avant qu’il ne soit trop tard.

Symptômes physiques

  • Maux de tête, migraines, nausées;
  • Manifestations dermatologiques;
  • Dysfonction gastro-intestinale (ex.: diarrhée, ballonnements, vomissements);
  • Manifestations cardiovasculaires (ex.: palpitations);
  • Tensions musculaires (mâchoire, cou, épaules);
  • Trouble du sommeil.

Symptômes comportementaux

  • Anxiété, irritabilité, insatisfaction;
  • Fatigue, état dépressif;
  • Impulsivité;
  • Troubles alimentaires;
  • Tabagisme, consommation d’alcool, de drogues.

Symptômes sur le plan de la vie sociale et du travail

  • Tendance au blâme (accuser les autres de ses divers maux, exprimer des reproches…);
  • Perte d’idéalisme, critiques, cynisme, attitude négative envers le travail;
  • Sentiment d’impuissance, culpabilisation, conflits;
  • Sensation de vide, apathie;
  • Absentéisme fréquent ou hyperassiduité (être trop présent ou présente au travail).

Symptômes cognitifs

  • Diminution de l’attention, de la concentration, de la mémoire;
  • Confusion, difficulté à prendre des décisions.

4 stratégies pour que le stress ne mène pas à l’épuisement

1. Prendre un pas de recul pour s’observer

Cela permet de faire le bilan des événements de stress. Vous saurez quoi modifier si vous savez d’où provient votre stress. Dans la mise en situation du début, Marie aurait pu, si elle avait pris ce pas de recul, parler de sa surcharge avec son employeur afin de trouver des solutions ou une aide nécessaire. On pourrait aussi lui suggérer de bloquer ses notifications le temps de se concentrer sur un travail et d’écrire à sa porte «NE PAS DÉRANGER. Attention, contenant en surcharge!»

2. Équilibrer sa vie pour «décrocher»

Tentez d’accorder du temps à votre vie professionnelle et personnelle. Faites de la place à la personne que vous êtes.

3. Identifier ce qui nous fait du bien

Trouvez ce qui vous aide à vider votre contenant à stress et qui vous fait du bien: rire, écrire, danser, chanter, parler avec des proches, faire une activité physique, marcher dans la nature, etc.

4. Prendre son pouls émotionnel

«Évitez d’éviter» les émotions désagréables et tentez plutôt de vivre vos émotions. Marie aurait pu prendre quelques minutes de pause afin de ressentir ce qui se passe en elle (sentiment d’impuissance, découragement, d’incapacité, de rage, etc.) pour ensuite pouvoir identifier les solutions, ce qui aurait été plus efficace à long terme.

Le stress fait partie de la vie. À tout moment, nous avons besoin de nous ajuster selon la quantité de stress dans notre contenant. Faire des bilans régulièrement et analyser le contenu, voire les modifications à apporter, et se donner du temps sont des choses qui peuvent aider à prévenir un épuisement. Donc, ayez un œil sur votre contenant interne… et n’hésitez surtout pas à en parler et à aller chercher de l’aide si vous en sentez le besoin!


Merci à Nathalie Parent, psychologue, auteure et conférencière, pour la rédaction de cet article.


Source
1. Tiré du tableau du livre La communication interpersonnelle en santé
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